. . .

Archives

Crise au Togo: les péchés de Faure Gnassingbé

Crise au Togo: les péchés de Faure Gnassingbé

Au pouvoir depuis le décès en 2005 de son père qui a dirigé de main de fer le Togo environ quatre décennies, Faure Gnassingbé fait depuis quelques mois face à une contestation de plus en plus vive de l’opposition qui réclame son départ du pouvoir.

Au pouvoir depuis le décès en 2005 de son père qui a dirigé de main de fer le Togo environ quatre décennies, Faure Gnassingbé fait depuis quelques mois face à une contestation de plus en plus vive de l’opposition qui réclame son départ du pouvoir.

togo manifestants criseDes manifestants à Lomé, capitale du Togo

Le Togo, pays de l’Afrique de l’Ouest, est depuis quelques semaines sur les lèvres. Dans ce territoire coincé entre le Ghana et le Bénin, deux pays qui se distinguent sur le continent noir par leur démocratie, c’est bien la question de l’alternance au pouvoir, un des principes du jeu démocratique, qui divise les acteurs. Les opposants au régime de Lomé souhaiteraient voir une personne autre que Faure Gnassingbé diriger le pays. Arrivé au pouvoir après le décès en 2005 de son géniteur-président qui a gouverné sans partage pendant trente-huit ans, Faure cumule déjà douze années dans le fauteuil présidentiel. Si de nombreux observateurs s’accordent sur le fait  que la gestion de Faure tranche de loin avec celle de son défunt père-président- le Produit intérieur brut est passé de 1,2% en 2005 à 4,9% en 2016 selon des statistiques de la Banque mondiale-, les Togolais, eux, ont visiblement du mal à faire une démarcation au niveau du patronyme. « Que ce soit Faure ou Eyadema, c’est toujours Gnassingbé », rappelle Julien, un Togolais rencontré à Cotonou. Le jeune homme estime comme l’opposition manifeste dans les rues que « la famille Gnassingbé n’est pas la seule du Togo et cinquante ans pour elle seule, c’est trop !»  A analyser cette plainte des opposants dans les rues depuis plusieurs mois, le premier péché du président Faure, c’est d’être un Gnassingbé.

Gagner du temps, l’autre péché de Faure

Le président Faure n’est en rien responsable en ce qui concerne son patronyme, mais il en est pour quelque chose dans la contestation actuelle contre son pouvoir. Le chef de l’Etat togolais, alors que l’opposition réclame depuis plusieurs années des réformes politiques, semblait jouer au plus rusé, en cherchant à gagner du temps et retarder le plus possible les réformes politiques.

Avant la présidentielle de 2015, l’opposition a exigé en vain le retour à la constitution de 1992 qui prévoit un scrutin uninominal à deux tours et limite à deux le nombre de mandats présidentiels. Un projet a même été introduit au parlement togolais à cet effet. Le discret président togolais a fait rejeter le projet de révision de la constitution par sa majorité à l’Assemblée nationale avant de se rattraper en août dernier sous la pression de la rue de réintroduire un projet. Adopté aux deux tiers par les députés, ce projet devrait bien être soumis à la population par voie référendaire. La répression meurtrière de la marche du Parti national panafricain (PNP) de Tikpi Atchadam le 19 août a, nul doute, été le péché de trop.

Gonflée par les cadavres

Officiellement, deux personnes ont perdu la vie dans la répression contre cette manifestation du 19 août. Une dizaine d’autres Togolais sont décédés dans les manifestations entre le 16 et le 19 octobre. Apparemment gonflée à bloc par ces décès, l’opposition a multiplié depuis lors, les manifestations populaires. Les descentes de l’opposition qui a très vite resserré ses rangs autour du PNP et Tikpi Atchadam vont crescendo.

A mesure que des Togolais tombent sous les balles meurtrières de l’Armée, le mouvement se durcit, les revendications avec. Des réformes politiques, notamment une réforme constitutionnelle et l’impossibilité pour l’actuel locataire du palais présidentiel de briguer un autre mandat en 2020 et un éventuel en 2025, l’opposition togolaise en est aujourd’hui à réclamer le départ pur et simple de Faure Gnassingbé du pouvoir. 

Plus ou moins dos au mur, Gnassingbé fils n’est cependant pas prêt à céder son fauteuil. Il joue la carte d’apaisement. Début novembre, il a annoncé des mesures en vue d’instituer le climat favorable à un dialogue politique à Lomé avec tous les acteurs. Entre autres, la levée de la restriction judiciaire contre Jean-Pierre Fabre, chef de file de l’opposition, la remise en liberté de certains manifestants interpellés et condamnés lors des manifestations et une main tendue à l’opposition qui la rejette. Ces mesures seront-elles suffisantes pour faire baisser la tension ?.